
L’audience qui s’est déroulée vendredi 25 avril au Tribunal d’Istanbul, statuant sur le sort de la sociologue et écrivaine exilée en France, a une énième fois ajourné sa décision au 21 octobre, ce malgré quatre acquittements en 27 ans d’acharnement judiciaire. Bien que harassée par cette injustice, Pinar Selek poursuit son combat.
La mascarade ne prendra donc jamais fin. À Istanbul, la justice turque aux ordres du président Recep Tayyip Erdogan à une fois encore reporté sa décision, au 21 octobre prochain cette fois, s’agissant de la sociologue et écrivaine Pinar Selek.
Cette cinquième audience du cinquième procès inique intenté à son encontre perpétue le calvaire qu’elle subit depuis maintenant 27 ans. Les juges lui reprochent en réalité de ne pas venir assister à son audience, elle qui, en exil en France depuis 2009, sait pertinemment que fouler le sol turc lui vaudrait de finir pour de longues années dans les geôles turques.
Un rassemblement de soutien organisé à Paris
En France justement, une centaine de personnes se sont rassemblées vendredi 25 avril au matin à l’Espace des femmes, à Paris, pour lui renouveler un soutien indéfectible. Présente à leur côté, Pinar Selek a accusé le coup lorsque la nouvelle est tombée. « C’est très épuisant pour moi. Mais nous allons continuer ensemble. Ce n’est pas mon procès, c’est notre procès », a‑t-elle lancé à ses camarades.
Quelques instants plus tôt, l’universitaire confiait à l’Humanité ne rien lâcher, même si elle concède que personne ne peut « s’habituer à un tel acharnement ». Des fascistes turcs sont d’ailleurs allés jusqu’à lui envoyer des lettres de menace à son domicile niçois, preuve que la pression est permanente.
La sororité comme réponse à l’arbitraire
« Cela fait 27 ans que le pouvoir turc cherche à t’enfermer dans les couloirs de l’absurde. Des impasses, des portes dérobées. Un labyrinthe au sein duquel tu as fini par y ouvrir des fenêtres, lui fait savoir Cédric, de la coordination européenne des comités de soutien à la chercheuse. Audience après audience, nous continuerons à tisser des liens, à faire tomber des murs, à construire des ponts ».
Pinar Selek, n’est pas seule, loin de là. Face à l’arbitraire turc, ses soutiens répondent par la sororité. À l’instar de deux militantes du collectif Femen, ou encore de Nathalie Tehio, présidente de la Ligue des Droits de l’Homme, qui a eu une pensée toute particulière pour le peuple Turc qui, en ce moment même, « se bat pour la liberté et pour la démocratie », ainsi que pour le peuple kurde. Des personnalités issues d’Italie ou d’Argentine ont également fait le déplacement.
Sororité jusque dans les geôles de Téhéran, puisque l’écrivaine a noué une relation indéfectible par voie épistolaire avec Narges Mohammadi, militante iranienne des droits humains et prix Nobel de la paix, toujours pas libre de ses mouvements. C’est tout naturellement que Ali et Taghi Rahmani, le fils et le mari de Narges sont venus défendre en personne Pinar Pelek, visiblement émue de leur présence. Tout comme Asal Abasian, journaliste iranienne Queer elle aussi en exil dans la capitale, et bien d’autres encore, d’universitaires à des représentants de la mairie de Paris.
« La torture vécue par le passé, je l’ai encore imprimée en moi. Le travail de sociologie que j’ai effectué aux côtés des Kurdes avant mon arrestation, je souhaite enfin le concrétiser, a annoncé Pinar Selek, dont le livre devrait sortir dans les mois à venir. Grâce à vous, j’avance ».
Antoine Portoles
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