Les possibilités d’inventer la politique malgré la violence extrême

Le mar­di 14 octobre de 18h30 à 20h30

biblio­thèque de la Part-Dieu
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Les écrits et la vie de Pinar Selek sont inti­me­ment liés. Socio­logue et roman­cière turque, enga­gée pour les droits fon­da­men­taux, fémi­niste et anti-mil­ta­riste, elle connaît depuis 1998 des per­sé­cu­tions en rai­son de ses tra­vaux de recherche au sein de popu­la­tions dis­cri­mi­nées et vic­times de vio­lences : sans domi­cile fixe, pros­ti­tuées, tra­ves­tis, trans­sexuels, femmes, Tzi­ganes, Kurdes, Arménien.ne.s.

 Elle est inter­pel­lée et incar­cé­rée durant deux années et demie, tor­tu­rée, puis remise en liber­té en 2000 sans avoir révé­lé les noms des per­sonnes auprès des­quelles elle a tra­vaillé. Elle est acquit­tée aux termes de trois pro­cès en 2006, 2008 et 2011 suite aux­quels l’accusation fait sys­té­ma­ti­que­ment appel. Depuis 2009, elle vit loin de chez elle : à Ber­lin d’abord, grâce à une bourse du Pen Club alle­mand, puis à Stras­bourg où elle a sou­te­nu sa thèse sur les mou­ve­ments d’émancipation en Tur­quie, et à pré­sent à Lyon où elle est cher­cheuse invi­tée au Col­le­gium Ecole Nor­male Supé­rieure de Lyon.

En 2013, tan­dis que le juge en charge est rem­pla­cé par un sup­pléant, la 12e cour pénale d’Istanbul révoque sa propre déci­sion d’ac­quit­te­ment et condamne Pinar Selek à la réclu­sion à per­pé­tui­té. Cette mêma année, la France lui accorde l’a­sile poli­tique et l’E­cole Nor­male Supé­rieure de Lyon lui décerne la dis­tinc­tion hono­ri­fique la plus éle­vée qu’une uni­ver­si­té fran­çaise puisse attri­buer à une per­son­na­li­té étran­gère en la fai­sant Doc­teure Hono­ris Cau­sa. Le man­dat d’arrêt inter­na­tio­nal sera annu­lé par Inter­pol en février 2014. Suite à l’appel de ses avo­cats, la condam­na­tion est éga­le­ment annu­lée à Anka­ra le 11 juin 2014 en rai­son des mul­tiples actes illé­gaux émaillant la pro­cé­dure, mais le dos­sier de Pinar Selek est une nou­velle fois ren­voyé devant les Assises.

À l’heure où nous écri­vons ces lignes, nous ne connais­sons pas l’issue de ce cin­quième pro­cès qui s’ouvrira le 3 octobre 2014. Ces 16 années d’épreuves morales et phy­siques n’ont enta­mé ni l’énergie de Pinar Selek, ni l’acuité de ses écrits tant scien­ti­fiques que lit­té­raires. C’est avec l’enthousiasme qui la carac­té­rise qu’elle a répon­du posi­ti­ve­ment à notre invi­ta­tion. Convain­cue qu’il faut « ana­ly­ser les bles­sures de la socié­té pour être capable de les gué­rir », elle nous par­le­ra des pos­si­bi­li­tés d’in­ven­ter la poli­tique mal­gré la vio­lence extrême. L’examen de l’espace mili­tant en Tur­quie, à tra­vers une plu­ra­li­té d’expériences, pré­sente de mul­tiples oppor­tu­ni­tés de com­prendre com­ment les dif­fé­rents mou­ve­ments contes­ta­taires, mal­gré la répres­sion, co-construisent les contextes et se co-construisent, dans une inter­ac­tion per­ma­nente entre eux et les autres acteurs, voire l’État.

Elle mon­tre­ra com­ment, dans ce contexte, le mou­ve­ment fémi­niste a été ini­tia­teur de la recons­truc­tion. Par­mi les ouvrages tra­duits de Pinar Selek : Service mili­taire en Tur­quie et construc­tion de la classe de sexe domi­nante : deve­nir homme en ram­pant (L’Har­mat­tan 2014), La Mai­son du Bos­phore (L. Levi 2013), Loin de chez moi… mais jus­qu’où ? (Ixe 2012).





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