Turquie : Consternation suite à la condamnation de Pinar Selek à la prison à perpétuité

Un tri­bu­nal a condam­né la socio­logue Pinar Selek à la pri­son à per­pé­tui­té pour ter­ro­risme. L’Observatoire pour la pro­tec­tion des défen­seurs des droits de l’Homme, pro­gramme conjoint de la Fédé­ra­tion inter­na­tio­nale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mon­diale contre la tor­ture (OMCT), qui a man­da­té des obser­va­teurs judi­ciaires pour ce pro­cès, est pro­fon­dé­ment cho­qué par cette déci­sion qui fait suite à 15 années har­cè­le­ment judi­ciaire.

Le 24 jan­vier 2013, la 12ème Chambre de la Haute cour cri­mi­nelle d’Istanbul a condam­né Pinar Selek, écri­vaine et socio­logue qui défend les droits des com­mu­nau­tés mar­gi­na­li­sées en Tur­quie, à la pri­son à per­pé­tui­té pour atten­tat et appar­te­nance à une orga­ni­sa­tion ter­ro­riste, suite à l’explosion inter­ve­nue dans le Bazar égyp­tien d’Istanbul le 9 juillet 1998. Les juges ont expli­qué qu’ils avaient déci­dé de se confor­mer à la demande de la Cour de cas­sa­tion de recon­naître la culpa­bi­li­té et condam­ner Pinar Selek à la pri­son à per­pé­tui­té.

L’Observatoire rap­pelle qu’en 1998, Pinar Selek a été tour à tour accu­sée sans preuves de sou­te­nir le Par­ti des tra­vailleurs du Kur­dis­tan (PKK), puis d’avoir fait explo­ser une bombe dans le bazar d’Istanbul. Sur la base de ces accu­sa­tions, elle a été déte­nue, tor­tu­rée et sou­mise à des mau­vais trai­te­ment pen­dant deux ans, avant d’être béné­fi­cier d’une libé­ra­tion pro­vi­soire en 2000. La 12ème Chambre de la Haute Cour cri­mi­nelle d’Istanbul l’a acquit­tée à trois reprises : en 2006, 2008 et 2011. Néan­moins, le pro­cu­reur ayant fait appel à chaque fois, la Cour de cas­sa­tion a annu­lé les déci­sions d’acquittement.

L’Observatoire rap­pelle que la pro­cé­dure pénale n’a pas réus­si à démon­trer que Pinar Selek a été impli­quée dans une quel­conque acti­vi­té de ter­ro­risme. En effet, les enquêtes judi­ciaires ont en grande par­tie confir­mées l’absence de bombe et ont attri­bué l’explosion à une fuite de gaz. De plus, l’autre accu­sé dans l’affaire, qui avait incri­mi­né Pinar Selek pen­dant un inter­ro­ga­toire, a reti­rés ses décla­ra­tions pen­dant le pro­cès.

Au cours de son obser­va­tion, l’Observatoire a rele­vé une série d’irrégularités, contraires à la légis­la­tion natio­nale et aux normes inter­na­tio­nales rela­tives aux droits de l’Homme. Une note d’observation judi­ciaire sera publiée pro­chai­ne­ment.

« Je suis pro­fon­dé­ment cho­quée par cette déci­sion. C’est une paro­die de jus­tice », a dénon­cé Sou­hayr Bel­has­sen, pré­si­dente de la FIDH.

« Ce cas est sans pré­cé­dent », a ajou­té Gerald Sta­be­rock, secré­taire géné­ral de l’OMCT, « Nous condam­nons fer­me­ment cette déci­sion, et appe­lons les auto­ri­tés judi­ciaires turques à la réexa­mi­ner immé­dia­te­ment », a‑t-il conclu.

Plus géné­ra­le­ment, l’Observatoire appelle une fois de plus les auto­ri­tés turques à ces­ser immé­dia­te­ment et sans condi­tions le har­cè­le­ment judi­ciaire qui vise Pinar Selek depuis plus de 15 ans, et dont l’unique objec­tif semble être de la punir pour ses recherches et ses écrits de socio­logue.

http://collectifvan.org/article.php?r=0&id=71112





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