Après la condamnation de Pinar Selek, la délégation raconte

ls sont par­tis mer­cre­di au petit matin pour Istan­bul et ren­trés dans la nuit de jeu­di à ven­dre­di. La quin­zaine de Stras­bour­geois pré­sents au 4ème pro­cès de Pinar Selek en Tur­quie s’est retrou­vée pour par­tie à l’ARES, dans le quar­tier de l’Esplanade à Stras­bourg, ce ven­dre­di midi. Ils ont racon­té leur périple et expri­mé leur colère, tout en assu­rant la socio­logue turque de leur constant sou­tien.

Ses sou­tiens se sont lar­ge­ment mobi­li­sés. La com­mu­nau­té turque, l’université, la classe poli­tique. Au len­de­main de son 4ème pro­cès à Istan­bul en Tur­quie, qui a abou­ti à sa condam­na­tion à la pri­son à per­pé­tui­té, Pinar Selek, réfu­giée à Stras­bourg, était entou­rée ce ven­dre­di d’une bonne cen­taine de per­sonnes au centre socio­cul­tu­rel de l’Esplanade à Stras­bourg. A ses côtés à la tri­bune, plu­sieurs membres de la délé­ga­tion de Stras­bour­geois qui s’est dépla­cée cette semaine à Istan­bul pour « faire pres­sion » sur la jus­tice turque, afin que Pinar Selek puisse ren­trer libre­ment dans son pays après 15 ans d’exil.

A l’issue de trois jours de voyage et de ten­sion, les membres de la délé­ga­tion, élus, mili­tants asso­cia­tifs ou poli­tiques, amis de Pinar selek, tous affi­chaient aujourd’hui des mines fati­guées, tel Abdel­ka­rim Ram­dane, repré­sen­tant du mou­ve­ment des Jeunes éco­lo­gistes du Bas-Rhin. Il explique :

« On a voya­gé de nuit, on a mal dor­mi. On est allé d’un endroit à un autre avec nos bagages. Mais je crois que c’était bien qu’on y soit [mal­gré l’is­sue]. On aurait regret­té de ne pas y être allé… »

« Por­ter des valeurs que notre ville pré­tend incar­ner »

Au sein de la délé­ga­tion, deux élus stras­bour­geois étaient pré­sents, Per­nelle Richar­dot (PS), rete­nue au conseil régio­nal ce ven­dre­di, et Eric Schultz, chef du groupe EELV au conseil muni­ci­pal. Ce der­nier notait à midi :

« [La quin­zaine de Stras­bour­geois com­prise] la délé­ga­tion comp­tait 80 per­sonnes, dont une cin­quan­taine de non-turcs, venues de Stras­bourg, mais aus­si de Mar­seille ou de Paris. Pinar a un ancrage asso­cia­tif fort à Stras­bourg et c’était natu­rel et légi­time de por­ter ses com­bats là-bas. Notre rôle en tant qu’élus de Stras­bourg : por­ter les valeurs que pré­tend incar­ner notre ville, celles de capi­tale euro­péenne des droits de l’homme, celles du Forum mon­dial de la démo­cra­tie, etc.

[Au tri­bu­nal] il y avait 50 à 60 avo­cats dans la salle, en robe, venus en sou­tien. Un mou­ve­ment extrê­me­ment jeune et fort. Le matin, on avait encore un peu d’espoir [quant à l’is­sue du pro­cès], mais en voyant l’attitude des juges et du pro­cu­reur, on a com­pris que ce serait défa­vo­rable… »

Autour de Pinar Selek ce ven­dre­di

Des juges « nar­quois », « comme au bis­trot », « qui se curaient le nez » face à un public « ten­du comme des arcs », décrit Irène Tabel­lion de l’association La Lune 67… Les membres de la délé­ga­tion parlent aujourd’hui de « pro­cès poli­tique », de « paro­die de jus­tice », de « scan­dale ». D’un pays où « ce qui est à craindre, c’est la fin de l’état de droit et de jus­tice » (Gun­ter Wall­raff).

Pinar Selek, encore sous le choc de cette condam­na­tion, la pre­mière après 15 ans de com­bat judi­ciaire, a indi­qué ce ven­dre­di qu’elle sou­hai­tait conti­nuer à se battre pour pou­voir « ren­trer chez [elle]« . Elle n’est donc pas pres­sée d’accepter les pro­po­si­tions d’asile poli­tique, for­mu­lée notam­ment par le dépu­té PS Phi­lippe Bies. Ce der­nier a redit son sou­tien à la cause de la jeune femme, tout en pré­ci­sant qu’il n’était pas néces­saire « de se pré­ci­pi­ter », qu’il faut « choi­sir les bons outils ».

« Je me bat­trai jusqu’à la mort »

Les avo­cats de Pinar Selek, repré­sen­tés à Stras­bourg par maître Camille Bal, ont dépo­sé un pour­voi en cas­sa­tion à Istan­bul. Les voies de recours n’étant pas épui­sées en Tur­quie, le dos­sier de la socio­logue n’est pas encore sur le bureau des juges de la Cour euro­péenne des droits de l’Homme. Elle conclut :

« J’ai tou­jours vécue dans une ambiance de lutte juri­dique, mais là, bien sûr, [mes amis, ma famille et moi] sommes fati­gués, nous ne sommes pas des machines… Mais je faire tout pour ren­trer à Istan­bul, ville dont je suis amou­reuse. Je me bat­trai jusqu’à la mort… »

Marie Mar­ty





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