Le procès en Turquie de la sociologue turque réfugiée en France Pinar Selek, poursuivie depuis seize ans pour une participation à un attentat à Istanbul qu’elle a toujours niée, a été reporté vendredi au 19 décembre à la demande de la défense.
Les avocats de Pinar Selek ont demandé un délai pour répondre aux réquisitions du procureur, qui a réclamé la perpétuité vendredi, a annoncé et déploré Pinar Selek lors d’une conférence de presse vendredi à Lyon, où elle vit depuis quelques mois.
Elle s’est montrée d’autant plus déçue que la cour criminelle d’Istanbul avait ordonné en octobre la levée d’un mandat d’arrêt la visant. De même, les tribunaux turcs l’ont déjà acquittée à trois reprises dans ce dossier fleuve, en 2006, 2008 et 2011, la cour de cassation ayant ensuite invalidé ces verdicts et ordonné un nouveau procès.
« Un nouveau procureur a pris la parole (ce vendredi, ndlr), il a lu une page reprenant mot à mot des accusations d’il y a 16 ans, les mêmes phrases, les mêmes mots, c’était choquant, alors que plein de choses se sont passées depuis », s’est indignée Pinar Selek, interrogée par l’AFP.
Sa défense a alors « demandé de renvoyer l’audience pour répondre à ces accusations et adapter leurs plaidoiries. Le juge a envoyé le procès au 19 décembre », a-t-elle ajouté.
Elle « pensait que le procureur demanderait l’acquittement car lors de la dernière audience, les juges, en levant le mandat d’arrêt, avaient dit que les preuves n’étaient pas fortes », a encore souligné Mme Selek.
Cette attitude de la justice turque « montre une position politique nationaliste pour empêcher toute négociation et processus d’ouverture, c’est de l’autoritarisme », selon la sociologue.
Vendredi matin, le comité de soutien de Pinar Selek et des membres de sa famille, s’étaient réunis devant le palais de justice d’Istanbul, avant le procès.
« Nous avons la conscience tranquille mais il ne s’agit pas d’une justice équitable, nous gardons beaucoup de doutes, nous continuons notre combat judiciaire et ne perdons pas espoir » a déclaré Seyda Selek, soeur et avocate de Pinar Selek, avant l’audience.
Aujourd’hui âgée de 43 ans, Pinar Selek avait été arrêtée en 1998 après une explosion sur le marché aux épices d’Istanbul qui avait fait sept morts et une centaine de blessés.
La justice reprochait à la sociologue, connue pour ses travaux sur les Kurdes, d’être membre de la rébellion du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et d’avoir préparé et posé la bombe, ce qu’elle a toujours démenti.
Elle avait été remise en liberté en 2003 après un rapport d’expertise attribuant l’explosion à une fuite de gaz.