Pinar Selek : son procès en Turquie renvoyé au 29 septembre

Réfu­giée en France depuis 15 ans, l’autrice était de nou­veau jugée ce ven­dre­di à Istan­bul. La jus­tice turque a récla­mé son extra­di­tion.

Nous allons gagner ensemble, j’en suis cer­taine », a‑t-elle dit sur le pla­teau de France 24 à la veille de ce 31 mars, où l’au­dience de son nou­veau pro­cès s’est tenue à Istan­bul. Pinar Selek ne s’y est pas ren­due. Mais outre une délé­ga­tion euro­péenne et des amis et un comi­té de sou­tiens turcs, la famille n’a pas fait défaut entre son père, avo­cat de 93 ans, qui a connu la pri­son après le coup d’É­tat de 1980, et sa sœur, deve­nue avo­cate pour la défendre. Un tra­vail qua­si à temps plein, comme nous le confiait la socio­logue et écri­vaine dont le par­cours confine à la tor­ture. Une tor­ture qui n’est pas près de se ter­mi­ner puisque son pro­cès a été ren­voyé au 29 sep­tembre pro­chain.

Réfu­giée poli­tique en France depuis 2011, deve­nue fran­çaise en 2017, elle est dans le radar du gou­ver­ne­ment turc depuis 25 ans. Bien qu’ac­quit­tée à quatre reprises, elle se retrouve de nou­veau sur la sel­lette puisque le par­quet n’a de cesse de faire appel. Et à chaque fois, la Cour de cas­sa­tion annule l’ac­quit­te­ment. Pire, en juin 2022, la Cour suprême annule la tota­li­té des acquit­te­ments : un man­dat d’ar­rêt inter­na­tio­nal est lan­cé, assor­ti d’un man­dat d’emprisonnement immé­diat…

Accu­sée d’a­voir com­mis un atten­tat

Il y a dix ans, face à sa condam­na­tion à per­pé­tui­té par un tri­bu­nal d’Is­tan­bul pour ter­ro­risme, elle a deman­dé l’a­sile poli­tique en France où elle enseigne à l’u­ni­ver­si­té de Nice depuis 2016. « Une par­tie de l’É­tat veut me condam­ner à per­pé­tui­té au motif d’a­voir tué des gens, mais plus per­sonne ne croit à cet atten­tat, qui était en fait une explo­sion sur un mar­ché aux épices d’Is­tan­bul », pré­ci­sait Pinar Selek. Le contexte était alors par­ti­cu­liè­re­ment ten­du entre le régime et le par­ti kurde, le PKK.

Tout com­mence en 1998, avant l’ar­ri­vée d’Er­do­gan : en 1998, elle a 27 ans. Ses recherches sur les mino­ri­tés l’a­mènent à inter­ro­ger des Kurdes et elle se retrouve alors dans le viseur des auto­ri­tés, qui veulent des noms. Elle est empri­son­née. Tor­tu­rée. Entre 2006 et 2014, elle sera quatre fois acquit­tée.

Que signi­fie ce nou­veau pro­cès deman­dé par de nou­veaux juges à la veille des élec­tions pré­si­den­tielles en Tur­quie ? « La plu­part des per­sonnes en Tur­quie, qui réflé­chissent, ont tout de suite com­pris que le tra­vail avant les élec­tions avait com­men­cé. Je crois que l’on peut s’at­tendre à d’autres évé­ne­ments de la sorte jus­qu’aux élec­tions, peut-être d’autres atten­tats ou d’autres accu­sa­tions, d’autres cri­mi­na­li­sa­tions. C’est une stra­té­gie du chaos et de la ter­reur », confiait-elle le 17 jan­vier à nos confrères de RFI. Les élec­tions auront lieu à la mi-mai.

N’ou­blions pas que Pinar Selek est aus­si écri­vaine et notam­ment l’au­trice de La Mai­son du Bos­phore (Lia­na Levi, 2013), d’un livre sur le géno­cide armé­nien qui a n’a fait qu’empirer sa situa­tion, Parce qu’ils sont armé­niens (Lia­na Levi, 2015). L’an der­nier elle publiait aux édi­tions des femmes Azu­ce­na ou Les four­mis zin­zines où elle montre Nice à tra­vers le regard des étran­gers de sa ville d’a­dop­tion.

Par Valé­rie Marin La Mes­lée avec l’AFP

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