Imaginez devoir fuir son pays pour un crime que l’on n’a pas commis et ce malgré 4 acquittements. Imaginez vivre sous la menace d’un mandat d’arrêt international.
C’est l’acharnement que vit Pinar Selek, intellectuelle franco-turque, et niçoise.
Nous l’avons rencontrée le 1er février 2023, à l’université de Saint Jean d’Angély, à Nice.
Pinar Selek est née en 1971 à Istanbul, d’une maman pharmacienne et d’un papa avocat et défenseur des droits humains. Son grand-père est Haki Selek, pionnier de la gauche révolutionnaire et cofondateur du parti des Travailleurs de Turquie (TIP).
Plus tard, elle devient sociologue, très investie dans l’associatif et contre les discriminations. Ce qui va l’amener par la suite à travailler sur la question kurde.
En 1998, elle a 27 ans et le 11 juillet, elle est arrêtée et torturée par la police d’Istanbul pour la forcer à donner les noms des personnes qu’elle a interviewées.
La jeune femme refuse, et est accusée d’avoir déposé la bombe qui aurait, le 9 juillet 1998, fait sept morts et plus de cent blessés au marché aux épices d’Istanbul. Plusieurs rapports d’expert ont certifié qu’il ne s’agit pas d’une bombe mais de l’explosion accidentelle d’une bouteille de gaz mais c’est le début d’un acharnement politico-judiciaire qui dure encore aujourd’hui.
Elle passe deux ans et demi en prison.
Elle est libérée le 22 décembre 2000 faute de preuves mais le procès continue.
Pinar est acquittée :
Le 8 juin 2006
Le 23 mai 2008
Le 9 février 2011
Le 19 décembre 2014
Entre le 3ème et le 4ème acquittement, la Cour annule son propre acquittement en novembre 2012 pour la condamner en 2013 à la prison à perpétuité.
Après le 4ème acquittement, la Cour suprême de Turquie l’annule le 21 juin 2022. Le Tribunal Criminel d’Istanbul lance un mandat d’arrêt international le 16 janvier 2023 alors que la première audience pour une cinquième demande d’acquittement doit se tenir le 31 mars 2023.